Les villages de la vallée de la Vézère, certains classés parmi les Plus Beaux Villages de France, doivent composer avec des aspirations parfois contradictoires : accueillir de nouveaux habitants, attirer les visiteurs et répondre aux critères de développement durable, tout en respectant un patrimoine classé exceptionnel.
La vallée abrite notamment quinze sites préhistoriques inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO, des églises romanes, des moulins et des habitations troglodytes nichées dans la roche. Les projets d’urbanisme doivent donc s’ancrer dans un contexte où la moindre pierre a souvent un peu d’histoire à raconter.
C’est pourquoi de nombreux projets doivent tout d’abord obtenir des autorisations de la part des Architectes des Bâtiments de France (ABF), notamment lorsqu’ils se trouvent dans le périmètre protégé des monuments historiques. Ainsi, sans surprise, ici plus qu’ailleurs, construire ou réhabiliter demande patience et concertation.
Avec son panorama où confluent la Dordogne et la Vézère, Limeuil est un joyau pittoresque qui attire chaque année des milliers de touristes. Toutefois, comme bon nombre d'autres villages médiévaux, Limeuil souffre d’un vieillissement de son bâti et d’une désertification progressive en basse saison.
Un projet-phare s’attelle à reconvertir d’anciens commerces vacants – une épicerie et une ancienne boulangerie du centre – en logements sociaux et en ateliers pour artisans. Ce programme, soutenu par la Région Nouvelle-Aquitaine et l’État, a pour ambition de réintroduire une activité locale à l’année afin de maintenir la vitalité du cœur du village.
Autre aspect notable de ce projet, la réhabilitation des ruelles pavées pour en faire des espaces accessibles aux personnes à mobilité réduite, tâche délicate dans un environnement où les rues grimpantes et les pavés irréguliers sont légion. L’objectif est double : préserver le cachet historique tout en rendant davantage le lieu inclusif pour les résidents comme pour les visiteurs.
Terrasson-Lavilledieu s’est depuis quelques années engagée dans un vaste programme d’embellissement et de modernisation. La municipalité concentre actuellement ses efforts sur la revitalisation des quais en bordure de la Vézère et du centre ancien.
Parmi les projets principaux figure la transformation de l’ancien entrepôt des bateliers en espace culturel et touristique. À cheval sur l’eau, ce site stratégique valorisera les savoir-faire locaux à travers une mise à l’honneur des métiers d’art et des artisans périgourdins. Une manière de faire revivre le passé commerçant de Terrasson, autrefois point névralgique du transport fluvial.
Autre initiative d’envergure : l’installation récente d’éclairages nocturnes doux, mettant en lumière les remparts et les toits dentelés de la vieille ville, tout en réduisant la pollution lumineuse. De nombreuses municipalités, à l’instar de Terrasson, incluent désormais dans leurs cahiers des charges des impératifs environnementaux comme la réduction des nuisances écologiques.
Le petit village de Saint-Léon-sur-Vézère, connu pour son église romane et sa sérénité bucolique, a récemment lancé un projet qui combine urbanisme et développement durable. Baptisé “Vivre en harmonie avec la Vézère”, ce programme vise à protéger les zones humides autour du village tout en aménageant un sentier éducatif sur le thème de l’eau et de la biodiversité.
Sous la houlette d’écologues et d’urbanistes, un parking écologique à l’entrée du village est également en cours d’aménagement. Semé d’espaces verts et utilisant des techniques d’infiltration naturelle des eaux pluviales, il permettra de réduire l’impact de la fréquentation touristique sur l’environnement fragile de la rivière.
Ce projet a vu le jour grâce à une mobilisation collective impressionnante : des habitants bénévoles, des élus motivés et des associations locales déterminées à concilier attractivité touristique et respect des équilibres naturels.
Dans nombre de villages de la vallée, les difficultés d’accès à un logement abordable pour les habitants permanents constituent un défi majeur. Le Périgord attire en effet de nombreux acheteurs extérieurs séduits par l’idée d’acquérir une résidence secondaire, entraînant une inflation des prix immobiliers et une raréfaction des logements disponibles pour les locaux.
Les municipalités comme Montignac, à deux pas de Lascaux, ont donc mis sur pied des politiques visant à réguler ces problèmes. Par exemple, une aide à la rénovation énergétique est aujourd’hui proposée aux propriétaires pour réhabiliter des maisons anciennes à l’abandon. Certaines communes expérimentent également des solutions innovantes, comme la “location de résidences secondaires à l’année contre un abattement fiscal”.
Ces initiatives, variées par leur nature et leur portée, reflètent la richesse et la diversité des priorités locales. Si chaque village conserve son identité propre, un fil rouge lie ces projets : l’envie de faire de la vallée de la Vézère un territoire soutenable, attractif et respectueux de ses racines. La pierre angulaire reste la concertation entre les habitants, les élus et les différents acteurs du territoire, clef d'un urbanisme réussi.
La vallée de la Vézère, au-delà de ses paysages enchanteurs, témoigne à travers ces actions d’une capacité à s’adapter aux défis contemporains. Si vous passez dans la région, ouvrez les yeux : derrière les murs anciens et les ruelles silencieuses, un subtil mélange d’hier et d’aujourd’hui est à l’œuvre.